Le 1 janvier 2022 à 18h30
Julien
Militant
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Les enjeux sont toujours les mêmes : comment considérer l’animal d’un point de vue éthique, juridique ou biologique. La thèse antique de l’animal-machine de Descartes n’est plus à rappeler ni même à réfuter. L’imaginaire collectif croit donc avoir dépassé cette idée saugrenue qui voudrait faire des animaux de simples corps mécaniques qui ne pensent plus, qui ne sont soumis qu’à leurs instincts les plus primaires. L’humain non averti croit donc savoir que l’animal, lui aussi possède une forme plus ou moins évoluée de ce qui se rapproche d’un esprit et qui gouvernerait son corps, tout comme l’esprit humain commande cet amas de chair et d’os qui constitue son enveloppe matérielle. Bon.
Le commun des mortels se fait une représentation de l’animal qu’il croit moderne, c’est-à-dire ayant surmonté, dépassé et refuté les erreurs des lumières, contemporaine et actuelle dans l’idée que cette représentation coïncide avec la realité partagée par le plus grand nombre. J’aimerais pouvoir partager cette thèse enthousiaste qui ferait de l’animal un être pouvant prétendre à une certaine dignité que lui avait enlevé le philosophe de la méthode. Malheureusement, la réalité qui s’offre à moi me fait voir que la représentation archaïque de l’animal s’est en fait incarnée, elle a littéralement intégré la chair de l’animal, son corps tout entier et l’en a fait une machine.
« Les mangeurs de viande ne mangent plus des animaux »
La rhétorique du mangeur de viande tourne souvent autour de la bonne chair, de l’animal ayant bien vécu et par un raisonnement logique légitime et très simple il associe la bonne viande à un bon animal. Si seulement c’était vrai ! Bien qu’il soit clair qu’il faille défendre une abolition de la viande, nous devons nous accorder, militants du droit des animaux, pour préférer ne serait-ce qu’un retour de « vrais » animaux d’élevage. Nous ne parlons pas des petits fermiers mais des industries agro-alimentaires qui fabriquent de la matière. Les animaux ne sont plus des êtres vivants au sens où nous nous les représentons, au sens où nous nous figurons ces petits êtres tout mignons qui hantent ironiquement tous les emballages de bouffe.
Nous pensons avoir cessé de faire de l’animal une simple machine alors que le rapport indirect mais pourtant le plus important (et le plus néfaste) que nous entretenons avec lui est celui de l’usage, comme un utilisateur à une machine, comme un consommateur à un objet. Le parallèle est et sera toujours critiqué mais il faut comprendre en quoi cette logique qui fait se dissoudre l’animalité de ces êtres est la même qui a fait dissoudre l’humanité qu’il pouvait rester des victimes des camps de concentration. Devenir une chose c’est perdre tout ce qui fait que l’on est ce que l’on est.
L’illusion ? Le mythe ? C’est toujours le même. En nous faisant croire que nous avons dépassé Descartes par un imaginaire collectif qui anthropomorphise l’animal de manière outrancière, l’industrie en profite pour réduire au maximum ce qui rapproche l’animal de l’homme. Le cercle vicieux nous entraîne dès lors que cette réduction, cette néantisation, cette transformation de l’animal en objet nous aveugle, nous écarte d’une réalité, et nous éloigne de toute prise de conscience. Car il est toujours plus facile pour le mangeur de hamburgers de se mentir et se dire que, finalement ce n’est pas si grave puisque ce que mange ce n’est presque plus du vivant, ce n’est presque plus de l’animal. Une fois l’existence de l’animal niée en tant que telle on peut déployer tout le système industriel qui confine les êtres « vivants ». L’animal n’est plus animé. Il se réduit à sa fonction de production de matière première. Il n’est plus animal, il est directement viande, il est n’est plus que machine à lait, machine à œufs.
Vindicte - dernière mise à jour le 26 juillet 2024
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