Le 1 janvier 2022 à 17h48
Julien
Militant
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Si les expressions d’une langue sont traduisibles d’un pays à l’autre, certaines subtilités culturelles sont définitivement propres. Je ne parle pas de détails grammaticaux techniques spécifiques à telle ou telle langue. Quels sont les premiers mots que l’on apprend quand on souhaite s’initier à une langue étrangère ? « Bonjour ! » , « Merci ! » ou « Comment allez-vous ? ». Ces mots si simples et si courants ne sont pourtant pas innocents et révèlent déjà, lorsqu’on s’y intéresse, les différences qui peuvent exister entre deux cultures. Alors qu’en suédois l’on se salue avec un Hey ! Hey !franc et naturel, une telle attitude chez nous passerait pour celle d’un farfelu ou encore d’un jeune en manque d’éducation.Puisque le langage est social et manifeste le rapport de soi à autrui, ce qui est significatif se trouve dans la manière que nous pouvons avoir pour désigner l’interlocuteur, c’est sur ce point précis que je voudrais que nous nous intéressions. Il y a ce que nous appelons le respectet la politesse. Le respect se porte sur soi, les autres, les règles, les institutions, les conventions, les idées. Ainsi nous pouvons dire que nous respectons des engagements comme nous respectons la loi et de même lorsque nous respectons les traditions c’est que nous sommes agissons conformément à ce qu’une majorité a auparavant décidé comme la bonne manière d’agir. Le respect d’une personne est légèrement différent et les nuances d’un pays à l’autre se manifestent à travers le langage.
En anglais il n’y a qu’un seul mot pour s’adresser à quelqu’un, c’est you(au singulier comme au pluriel) que les français traduisent par tu ou par vous. Comment faire pour savoir quel terme utiliser ? Par la situation et le rapport qu’entretiennent les deux interlocuteurs. C’est pourtant une grande nuance de la langue anglaise qui perd de sa force quand elle est traduite. Le vouvoiement est un phénomène plutôt intéressant. Il marque une certaine distance en conférant à l’interlocuteur une qualité supérieure : vous est une personne du pluriel, marque le nombre. On vouvoie en général quelqu’un de plus âgé que soi, de plus gradé, de plus noble. Le vouvoiement peut-être une marque sociale là où certains enfants vouvoient leurs parents, d’autres les tutoient. Cette marque de respect n’est pas toujours bilatérale. Deux personnes âgées se vouvoient lorsqu’elles ne se connaissent pas, se tutoient avec plus d’intimité. Parfois certains tutoient et exigent d’être vouvoyées. En allemand comme en espagnol et d’autres langues la marque de respect se traduit par la troisième personne. Sieen allemand et Usteden espagnol montrent un éloignement qui se retrouve dans les vieilles expressions françaises comme « Monsieur voudra bien se donner la peine de… »où l’interlocuteur est carrément désigné indirectement et on imagine qu’un serviteur de la même manière n’oserait lever ses yeux à la hauteur du regard de sa majesté ! Le respect se traduit dans le langage, il est l’image de la relation sociale. Celui-ci prend beaucoup plus d’importances dans certaines langues comme le vietnamien qui a hérité du patrimoine confucéen dont semble s’être débarrassé le mandarin.
Saluer quelqu’un c’est lui souhaiter d’avoir une bonne journée, un bon jour. Ce que l’on retrouve dans beaucoup de langues : Guten Tag , Buenos dias , Buon giorno… Alors que dans d’autres langues c’est directement le bonheur ou la paix que l’on souhaite à la personne à laquelle on s’adresse : Shalomen hébreux signifie paix, et la locution chinoise 你好 qui se traduit par bonjoursignifie littéralement « bonheur à toi ». En vietnamien le verbe saluer chàone peut s’employer seul, il doit être accompagné d’un complément qui désigne la personne que l’on désire saluer et qui diffère selon le sexe, l’âge, le statut des deux interlocuteurs.Chào cô, chào bà, chào ông, chào anh, chào chi, chào emsont donc différentes manières de saluer suivant si la personne s’adresse à une jeune femme, une dame plus âgée, un homme plus âgé, un jeune homme, une jeune femme du même âge… Le respect est tellement présent dans la langue vietnamienne que même si il existe un mot pour la première personne « tôi », celui-ci n’est utilisé qu’en privé entre personnes de même âge, chez les jeunes. Le reste du temps chacun est donc désigné à la troisième personne en utilisant les mêmes « pronoms » qui marquent le respect.
La politesse est une convention de langage et de comportement. Pourtant certaines communautés comme celle des compagnons pensent, à juste titre, que la politesse qui est signe de respect passe par l’égalité avant-tout et que cette dernière peut très bien s’accommoder du tutoiement. Parfois le vouvoiement qui facilite la distanciation n’est effectivement pas la marque du respect mais cache aussi le mépris.
Vindicte - dernière mise à jour le 26 juillet 2024
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